Kathleen travaillait, ce matin là. Comme de coutume, ils s'étaient levés ensemble pour déposer les enfants chez leurs camarades de classe, avec qui ils se rendraient à l'école. Se lever ensemble pour déjeuner ensemble et être une famille. Envers et contre tout. Malgré la dispute qui avait encore fait rage la veille au soir. Kathleen l'avait à nouveau questionné sur la provenance du liquide qu'il avait dans son porte-feuilles et dont elle n'avait trouvé aucune trace sur les relevés de comptes. Et elle ne se contentait plus vraiment de ses parades humoristiques. "Je fais gogo dancer sur mes heures de pause, chérie"... Heureusement que les enfants étaient déja couchés - Kathleen avait attendu son heure.

Pourtant, ils s'étaient levés ensemble et avaient fait les parents exemplaires pour leurs enfants. Eddie aurait fait - non faisait bien pire pour eux. Il se demandait parfois jusqu'où il irait pour assurer leur bien être et leur avenir... A tous les trois d'ailleurs, puisque malgré tout, il aimait Katleen comme au premier jour.

Il l'avait laissée devant l'entrée de l'hopital, alors qu'ils avaient fait la route dans un silence tendu. Pour ne pas pousser le bouchon, il lui avait déposé simplement un baiser sur le front en lui passant un bras autours des épaules et avait regagné sa voiture.

Il était alors encore très tôt pour rejoindre le bercail, et, se demandant ce qu'il allait bien pouvoir faire en attendant. Et puis l'inspiration vint. Simple, efficace. Il s'arrêta au Randy's Donuts, le meilleur endroit à son avis pour profiter d'un moment de détente avant le rush de la journée. Un bon café, un ou deux donuts - histoire d'avoir une motivation supplémentaire pour aller passer une heure ou deux à la salle de sport. Oh bien sur, il avait un peu mauvaise conscience à s'offrir une gourmandise, pour sa ligne. Mais après tout, hein...

Il sortit de la voiture et enjamba le trottoir. Poussa la porte et s'approcha du comptoir pour commander son café et ses deux donuts. Au chocolat. Il s'installa à une des tables alors que la serveuse lui apportait sa commande. Eddie l'accueillit avec un de ces sourires radieux dont il a le secret.

" J'espère que je ne vais pas finir rond avec ca ! "

Voyant que la serveuse ne comprenait pas, il brandit vaguement un des donuts. Rond. D'où la... blague... Comme la serveuse était visiblement sceptique sur la qualité de son humour, Eddie leva une main pour lui faire signe de laisser tomber.

" Non, ok, elle était pas drôle... Merci... "

Levant les yeux au ciel, la serveuse lui tourna le dos et retourna derrière son comptoir, alors qu'Eddie haussait les sourcils en grimacant. Non, il n'était pas encore très réveillé. Pour y remédier, il prit une gorgée de café. Revigorant. Il adorait ce café, y'avait pas de doute. Et à cette heure-ci, pas de risque d'être dérangé...

Samuel prenait son rôle de père très au sérieux. Sa petite princesse ne demandait pas tant d’attention, mais il ne voulait pas entendre un truc du genre « Est-ce que je peux retourner avec maman ? » Il l’adorait, mais il y avait également une certaine fierté masculine dans le fait de remplir pleinement son contrat de papa. Son ex-femme devait tout simplement bouillonner de rage. Toutefois, il était toujours aussi pris par son travail. L’enquête démarrait lentement, il devait commencer par prendre ses marques dans la ville, obtenir énormément de renseignements que ce soit sur les gangs et le fonctionnement des forces policières de la ville. Il en savait déjà un minimum, il voulait le maximum. Sam n’était pas exactement le genre d’homme à faire les choses à moitié. Il savait qu’à un moment ou un autre, il finirait par négliger sa fille et cette idée lui donnait mal au cœur… Il l’habilla, déjeuna avec elle et alla la reconduire à l’école. Ceci étant fait, il était encore très tôt, il savait précisément à quoi ressemblerait sa journée, mais pour l’instant, il avait besoin d’un café, histoire d’être bien réveillé ! Ne connaissant pas très bien la ville, il choisit le premier endroit qu’il croisa. Un petit café qui lui sembla rustique, mais plutôt amical. Il s’installa au comptoir et commanda un café bien noir. Il alla ensuite ce choisir une table, prit un journal et décortiqua les dernières nouvelles. Vêtu d’un simplement jeans et d’une chemise, il ne pouvait pas être plus en civile que cela. Rien ne laissait croire qu’il pouvait être un agent, encore moins du FBI.

" J'espère que je ne vais pas finir rond avec ca ! "

Samuel releva la tête et regarda en direction de l’homme qui venait d’entrer. Il eu un mince sourire en voyant l’expression de la serveuse, qui ne trouvait visiblement pas la blague très amusante. L’agent fédéral avait déjà vu cet homme, à cette petite rencontre qu’il y avait eu à l’école entre les parents et les enseignant. Ils avaient prit un café ensemble et avait partagé certaines histoires sur les deux monstres respectifs. Il lui avait semblé être une personne agréable. Leurs enfants s’entendaient assez bien. Baissant les yeux vers son journal, il fut interrompu par un appel sur son cellulaire. Qui pouvait bien l’appeler à cette heure ? Il fut assez étonné d’entendre la voix de l’enseignante de sa fille. Lui disant que Jude s’était battue et qu’elle avait blessée un autre enfant. Il n’en revenait tout simplement pas, sa fille avait beau avoir tout un caractère, elle n’était pas une bagarreuse… Si ? Alors qu’il attrapait ses affaires pour se rendre à l’école il entendit un autre téléphone sonner. Celui D’Eddie, le père d’Isaac. En suivant la conversation, l’ancien militaire comprit rapidement de quoi il s’agissait. Il espérait simplement qu’il n’y avait rien de grave. Il glissa une main découragée sur son visage. N’était pas exactement le genre d’homme à prendre la fuite, il s’approcha lentement vers lui.

« Samuel, le père de Jude, vous vous souvenez de moi ? Je crois que nous avons un problème commun, et c’est ma fille… » dit-t-il d’une voix basse.

Qui de mieux qu’un père pour comprendre ce qu’un autre parent pouvait ressentir. Il n’avait pas eu de détails sur ce que sa fille avait pu faire à son fils. C’était certainement une simple bousculade qui avait mal tourné. Il l’a connaissait assez pour savoir qu’elle n’était pas une enfant méprisable et qu’elle n’avait certainement pas cherché à faire du mal. Eddie avait amplement le droit d’être en colère, c’était bien normal.

« Vous savez ce qui c’est passé ? » demanda-t-il calmement.

Il savait une chose, il ne devait pas s’énerver sinon ce serait pire. C’était peut-être complètement bénin. L’école faisait souvent tout un plat d’une petite écorchure. L’établissement scolaire était juste à côté du petit café, ils pouvaient s’y rendre rapidement. Pour l’instant il voulait simplement entendre la version du père d’Isaac. La suite il le saurait une fois rendu à l’école.

Eddie n'avait pas vraiment remarqué Samuel. Il était plus parti pour passer un petit dejeuner au calme avant de prendre son boulot. En entendant le téléphone de Samuel, il s'était vaguement retourné : on perturbait son petit dej ! Bon après... ce n'était pas la faute de ce pauvre type si son téléphone sonnait, hein ? Il retourna donc à son donut. Pourtant, il semblait qu'il était écrit qu'il ne profiterait pas de son donut en paix : son téléphone sonna dans la poche de son cuir, posé à côté de lui.
Avec un soupir, Eddie prit une dernière bouchée de donut, le reposa, s'essuya vaguement les mains sur son jean et fouilla dans ses poches pour en sortir l'appareil, pour répondre d'un air guilleret. A tout les coups, c'était Sean qui allait lui proposer une balade à Hillcrest.

" Harrison... Oui... quoi ?! Ok j'arrive... "

Très vite, son expression joyeuse avait laissé place au sérieux, puis à l'inquiétude. Que s'était-il donc passé avec Isaac ? D'habitude, c'était un enfant paisible. Mais il est vrai que la situation familiale actuelle pouvait destabiliser les enfants...
Il engloutit rapidement son donut, avala son café d'une traite, grimaca parce qu'il s'était brûlé et se leva en ramassant son cuir. Il était en train de l'enfiler quand Samuel s'avanca. Il le salua d'un signe de tête et le recadra rapidement. Autour d'un gâteau etouffe-chrétien fait pas les blanches mains de la divorcée de service à l'école des enfants, ils avaient passé un bon moment à echanger sur les exploits de leurs têtes blondes. Un type sympa quoiqu'un peu austère. Mais sympa. Sauf qu'apparament, c'était avec sa fille qu'Isaac s'était frotté.

" Non, Mrs Costello n'est pas entré dans les détails, à part qu'Isaac a une griffure à la joue... Comment va... Jude, c'est ca ? "


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